La Fédération jurassienne, le mouvement des « anarchistes du Jura » - eux préféraient s’appeler « collectivistes » -, n’eut qu’une brève existence à la fin du 19ème siècle. Pensants, remuants, indépendants, ces ouvriers horlogers refusaient de se donner des chefs et avaient décidé que leur mouvement ne s’organiserait pas en parti pour que le prolétariat ne devienne pas à son tour un oppresseur. L’État, la « comédie » de la politique parlementaire allaient céder la place à une fédération fraternelle des communes et des associations de métiers. Ils refusaient l’action violente à laquelle ils opposaient la propagande par l’exemple et l’instruction. Autant dire que, comme s’ils avaient voulu lutter contre la gravité, leur révolution tranquille était vouée à l’échec.
Pour écrire La Chute des corps, depuis 2003, sa quête a mené Michel Beretti sur les sentiers campagnards qu’emprunta Bakounine dans le Val de Saint-Imier, dans les cafés où ils se réunissaient, eux qui étaient abstinents, dans les greniers à la recherche de leur mystérieuse bibliothèque disparue. Et si leur rêve, leur tentative magnifique et désespérée représentait l’avenir ?